J’allume des bougies et mets en marche le lecteur CD pour que Jean-Sébastien Bach me donne envie d’écrire des mots sur ses notes « clavecinées ». Cette musique froide me crie un besoin de réchauffer mes lettres par cette nuit sombre, en absence de lune. La nuit est également absente dans mon esprit, elle était brumeuse et a finalement disparu. Seules les étoiles frissonnent dans un recoin de ma tête ; brillantes et vacillantes comme mes bougies, et bientôt fumantes comme celle qui s’est éteinte à l’instant, elles font fuser mes idées.
Une portée plus tard, j’observe la rue noire par ma fenêtre et par laquelle je peux apercevoir un chat marcher nonchalamment. Soudain, il s’arrête. Il m’observe. Il s’assoit. Sa queue remue gentiment et de manière très douce. Il a l’air calme, ses yeux transpirent l’oisiveté et son odeur semble être celle du jasmin. Je peux la sentir jusqu’à ma fenêtre entr’ouverte. Est-ce mon imagination qui fonctionne ou mon odorat ? Je ne sais pas mais j’ai envie de croire que je peux la sentir. Je détourne alors mon regard, un instant attiré par la fumée sortant d’une cheminée d’usine. Cinq secondes plus tard, lorsque mon regard veut se reposer sur le chat, il a disparu.
J’allume une cigarette : celle du soir, celle qui apaise, celle qui transcende toute nuisance. Je sens désormais pénétrer la fumée dans ma gorge, elle la chatouille, elle l’envahit. Quelle sensation exquise pour un fumeur invétéré ! Mon sang est alors divinement assailli par la nicotine. Mon pouls s’accélère et d’un coup, ralentit. Mes membres tremblent sous cette douce drogue. Cette addiction devrait me dissuader de la consommer. Mais l’indifférence est de mise ce soir. J’écrase à présent décemment ma cigarette et la dépose dans le cendrier, à moitié rempli.
Je me remets à observer les étoiles scintillantes en écoutant les notes effrénées du clavecin de l’interprète. La magnificence de ces prunelles blanches s’accapare de moi ! La brillance de ces joyaux musicaux me fait planer ! Devrait les accompagner le rire : le rire d’une amie, de l’ange qui sommeille en elle, la femme. La joyeuse inconnue de mon cœur ne s’est pas encore montrée. La hâte m’habite et m’anime. Ces merveilleux instants devraient l’attirer. Mais brûlera-t-elle de la même envie que celle qui se dessine en moi et qui me consume ? Cette envie semble anodine mais elle a toute son importance. Elle devrait rimer avec patience. Mais l’envie de monter au ciel avec cet ange pendant ces petits moments me rend cruellement impatient. Impatient de partager ces instants, j’éteins désormais ma bougie et rejoins mon lit refroidi par la nuit.
J’espère qu’un jour, elle montrera de l’intérêt pour ces moments, ceux que je ne peux m’empêcher d’apprécier à leur juste valeur. Ceux qui m’envolent et qui m’envoleront peut-être un jour avec elle.
Ces instants qu'on oublie si souvent... La nuit est calme, le ciel noir...