Errant dans les méandres de ma destinée, j’ai rencontré un jeune garçon aux cheveux bouclés. Il avait un visage d’ange mais était mû par la tristesse. La tristesse qui le gouvernait ne peut être nullement comprise par autrui, surtout lorsque celle-ci se trouve dans les yeux d’une autre personne. J’ai alors regardé ses jambes : elles étaient tremblantes et malingres. Elles n’avaient plus de force et survivaient au froid glacial de l’hiver. Alors qu’il s’avançait en regardant le sol avec ses yeux vidés de toute joie, je l’interpelai.
J’ouvris la bouche et lui demandé quel mal-être le guidait. Pourquoi était-il si désespéré, désemparé et triste ? Malheureusement, même si ses lèvres voulaient entreprendre un semblant de réponse, jamais il ne put me faire entendre le son de sa voix. Il était comme pétrifié à l’idée de parler à quelqu’un. J’eus envie de l’aider.
Il a alors compris que personne ne pourrait m’empêcher de faire ce que mon cœur avait envie d’accomplir. J’avais la ferme intention de lui montrer un chemin qu’il ne connaissait pas encore, même si je ne connaissais absolument pas ce garçon. Il me regardait, l’air sombre et circonspect, comme pour me demander si sa vie allait changer après cette rencontre. Et pour je ne sais quelle raison, je lui racontai un bout de mon histoire.
Je commençai alors par lui dire que parfois la vie n’est pas celle que tout le monde attend et continuai avec d’autres lapalissades que tous ont conscience mais ne veulent pas entendre. Pour poursuivre, je lui parlai de ma destinée, qui n’avait pas toujours été amusante. Il continuait de me regarder avec prudence sans savoir où je voulais en venir mais son visage n’était plus figé, il commençait à s’ouvrir. Je lui dis ensuite que c’était le moment de prendre la vie comme elle venait, certainement pas pour la subir, mais davantage que comme il la vivait. Je continuai mon récit en lui expliquant que mon moteur de vie était l’ouverture aux gens qui m’entourent, à l’amitié, voire l’amour ; toutes ces facettes du bonheur qui font que la vie se teinte parfois d’autres couleurs.
Je ne sais comment mais après ce monologue, son visage et son regard changèrent : ils s’étaient éclaircis et on pouvait y découvrir un début de sourire. Ce joli rictus me fit alors comprendre que la mission que je m’étais donné, et qui me semblait onirique, avait porté des fruits auxquels je ne m’attendais pas.
Quelques années plus tard, ayant réfléchi pendant des heures, des jours et même des mois sur la question, il me vint une explication au changement d’attitude de ce jeune garçon. Ma conclusion était que ce dont avait besoin le jeune homme était non pas qu’on l’écoutât mais bien qu’on lui parlât. Il le lui avait été nécessaire mais il l’ignorait car toute sa vie, il avait voulu être une personne active, mais n’avait été remercié que par la frustration et la déception. Il en avait fini par devenir passif à tout ce qui l’entourait.
Peut-être ne le reverrai-je jamais mais au fond de moi, je suis sûr qu’il remercie le ciel et la destinée de l’avoir emmené sur cette route, et par laquelle je passais. Le destin était enfin intervenu dans sa quête d’une réponse.
Adieu jeune homme, et merci pour ton oreille attentive !